L’intelligence sociale

Aujourd’hui nous vivons un changement de paradigme fondamental concernant la défense et la sécurité de notre Nation. La globalisation des conflits et leurs systémisations engendrent un transfert des zones de conflits et apportent les violences au sein de notre territoire. Aujourd’hui, des actions de guerre sont mises en place sur notre sol national.Aussi, il faut repenser la gestion du terrorisme islamique, qui est aujourd’hui la conséquence de l’importation du conflit sur notre territoire, comme une guerre asymétrique ou insurrectionnelle ou non conventionnelle et non comme le terrorisme politique que l’on a pu connaître auparavant.

Fondamentaux :

La guerre asymétrique ou guerre insurrectionnelle constitue un conflit dans lequel l’ensemble des forces  militaires, sociologiques et politiques, sont déséquilibrées.

Pour Philippe Moreau-Defarges, dans une guerre asymétrique, « tous les moyens sont bons pour emporter la victoire, les règles volent en éclats ».

La guerre révolutionnaire est cruelle, car chaque citoyen, quelle que soit sa volonté, y est impliqué directement et de façon active par l’insurrection, qui ne peut pas se permettre de le laisser conserver sa neutralité. L’objectif du pouvoir politique en place est alors à minima de maintenir la neutralité de sa population et de conquérir son adhésion.

 En effet, dans la guerre révolutionnaire, l’ennemi trouve sa protection au sein de la population.
  • Galula : « Le gouvernement loyaliste ne peut pas arriver à grand chose si la population n’est pas et ne sent pas protégée contre l’insurrection ». Aussi, « La principale source d’information sur la guérilla est le renseignement obtenu de la population ». Ainsi l’action première et primordial dans la gestion de la guerre contre-insurrectionnelle est de recueillir du renseignement auprès des zones de population au sein desquelles les insurgés ont pris position.
  • En effet, « Jusqu’au moment de révéler clairement ses intentions en s’engageant dans l’action subversive ou dans la violence au grand jour, l’insurgé ne constitue qu’une menace potentielle et imprécise pour le loyaliste et n’offre pas de cible matérielle pouvant justifier le déploiement de la puissance de son adversaire. » 

La force de l’insurgé se base sur des ressources immatérielles dont la plus importante est la puissance idéologique d’une cause sur laquelle basée son combat. Celle-ci lui permet de justifier ses actions violentes et lui permet le recrutement par la persuasion.

  • « La situation sociale est particulièrement propice à l’insurrection », les difficultés socio-économiques présentes au sein de nos quartiers sensibles sont un terreau extrêmement favorable au développement d’idéologies radicales notamment dans le cadre d’un communautarisme exacerbé.

La stratégie des insurgés est de s’implanter dans des zones qui sont particulièrement éloignées du pouvoir loyaliste. L’urbanisation de nos quartiers sensibles a offert un terrain propice au développement d’une insurrection.

Ensuite, ils agissent en 2 étapes :
  1. le terrorisme aveugle afin de focaliser l’attention du public et de recruter
  2. le terrorisme sélectif pour isoler le pouvoir en place des masses et obtenir la complicité passive de la population
Pour combattre une insurrection, les actions à mettre en place dès le début sont :
  1. infiltrer les insurgés
  2. renforcer l’appareil politique des loyalistes au sein de la population pour couper ses liens avec l’insurrection
Nécessaire d’appliquer la pensée complexe :

la pérennité du vivant dépend de l’équilibre permanent entre les processus d’autodestruction des cellules et leurs renouvellements. Les équilibres organisationnels naissent de l’équilibre de forces antagonistes. Les antagonismes ont une forte potentialité désorganisatrice et ils font irruption en cas de crise. La complexité résulte des interactions locales et globales, la dynamique d’aller/retour implique que le tout soit plus fort que les parties. Le pouvoir central se doit de recréer l’équilibre des forces au sein de ces quartiers.

Les lois spécifiques de la contre-insurrection 
  •  le soutien de la population est vital pour les 2 camps
  • ce soutien s’obtient par l’action d’une minorité active

Aussi, l’objectif des loyalistes est d’identifier la minorité favorable et de l’organiser de façon à mobiliser la population contre la minorité insurgé&nbsp;; pour cela il doit inventer une&nbsp;<span>contre-cause</span>. Cette préparation politique&nbsp;est le problème le plus délicat, le gouvernement doit s’armer d’une contre-cause compétitive et il ne peut s’appuyer sur des problèmes de 2nd ordre qui font invariablement appel à la raison en un temps où la passion est le moteur principal. Le gouvernement doit concéder des réformes politiques pour obtenir le soutien de la population.

Les stratégies à mettre en place :
  1. Unicité du commandement : il ne doit y avoir qu’un seul et même chef. Cependant la difficulté relève que les opérations civiles et militaires se recoupent tout au long de la guerre insurrectionnelle.
  2. Le soldat aura la charge d’organiser, d’équiper, d’entrainer, et de diriger des unités de défense passive créées dans la population.
Problème : comment recruter un grand nombre de civils dignes de confiance quand la loyauté de chacun est sujette à caution ?

Actions&nbsp;: trouver des relais pour les loyalistes dans la population et organiser leurs actions. Il faut le faire de telle façon que les hommes qui mènent la contre-insurrection disposent d’une certaine marge d’initiative tout en restant sous le contrôle du gouvernement.

Primauté du pouvoir politique sur le pouvoir militaire :  

Une guerre révolutionnaire est faite de 20% d’action militaire et de 80% d’action politique. La contre-insurrection se gagne par le politique, l’usage de la force doit être strictement limité au nécessaire et les réformes politiques doivent être mises en place afin de rallier la population civile au pouvoir central.Le gouvernement doit être suffisamment sage pour vérifier que ce qu’il propose est réellement voulu par le peuple, il doit enquêter objectivement sur les revendications populaires.

Coordination des efforts :

Il faut mettre en place un Etat-major civilo-militaire. Dans tous les cas, les militaires doivent restés subordonnés à l’autorité civile locale. Les structures militaires et civiles doivent être mixées pour assurer la continuité de la stratégie.

Primauté du commandement local : 

Les forces armées ont 2 missions : réduire le potentiel militaire des insurgés et sécuriser l’ensemble du territoire. 2 types d’unités doivent être mises en place : des unités mobiles qui vont combattre de manière relativement conventionnelle et des unités statiques qui vont vivre au sein de la population pour la protéger et pour servir de bras armé à l’action politique. Le chef de l’unité locale doit avoir autorité sur toute force militaire opérant dans sa zone.

Adaptation des forces armées aux nécessités de la contre-insurrection :

Les unités locales sont confrontées à une multitude de tâches non militaires qui doivent être menées à bien pour s’assurer du soutien de la population, mais qui ne peuvent l’être que par des militaires en l’absence de leaders politiques et d’agents administratifs dignes de confiance.

Adaptation des mentalités :

Dans la guerre contre-insurrectionnelle la règle est de faire un usage de la force aussi limitée que possible , le rôle du soldat est d’aider le gouvernement à gagner le soutien de la population ; il doit pour cela s’engager un minimum politiquement. Le Gouvernement doit disposer d’une élite ayant compris la nature de cette guerre, elle dispose de 2 moyens : l’endoctrinement et la formation ou recrutement direct. Le recrutement direct est nécessaire dans un 1er temps car l’endoctrinement et la formation prend du temps.

La 1ère région choisie doit être une région test :

Tester signifie expérimenter, le retour d’expérience doit être organisé avec attention et de façon délibérée afin d’améliorer la stratégie et la tactique de lutte contre-insurrectionnelle.

Les Opérations :

Prise de contrôle de la population :

  1.  ré-établir l’autorité du pouvoir loyaliste sur la population
  2. isoler au maximum la population de la guérilla par des moyens physiques
  3. recueillir les renseignements nécessaires pour éliminer les cellules politiques de l’insurrection 
Attention à ne jamais s’aliéner plus de monde à la fois que l’on ne peut en contrôler.
Attention à ne pas produire une justice à 2 vitesses, la justice doit être gérée à l’échelon supérieur.

La population doit se sentir protégée, si la police en place n’est pas digne de confiance, il faut créer une police spéciale.

Situation insurrectionnelle actuelle au sein des quartiers prioritaires :

Aujourd’hui l’abandon au sein des quartiers prioritaires de l’ensemble des institutions représentant les valeurs de la République et notamment l’abandon de la présence des forces de l’ordre engendrent le fait que la population civile de ces quartiers ne se sent pas pris en compte par le «&nbsp;gouvernement loyaliste&nbsp;» et donc se range par nécessité du coté des insurgées.

Problèmes actuels : 
  •  l’importance des médias et la propagande virale sur internet : avantage de l’insurgé, il est jugé sur ses promesses et non sur ses actes
  •  la faiblesse des gouvernements démocratiques occidentaux
L’objectif premier est de s’assurer que la population civile est du « bon coté ».

Comme la stratégie présentée ci-dessus, la première étape à mettre en ouvre est la collecte de renseignement au sein de la population de ces quartiers.

Nous identifions 5 catégories de population :
  1. classique exposée ;
  2. classique fragile ;
  3. délinquantielle ;
  4. criminelle ;
  5. radicale...

L'histoire est une preuve expérimentale, qui nous permet d'anticiper le phénomène insurrectionnel plus que le négliger au risque de voir cette longue histoire se répéter par nos erreurs de jugement, d'évaluation.

Jean-Charles Poupel - Président National de CNC-IHEDN